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La métamorphose culinaire des rues de Bangkok
Un vent de changement souffle sur Bangkok avec l’initiative des autorités locales de rendre piétonnes certaines artères de la ville durant les weekends nocturnes. Dans cette métropole reconnue comme une plaque tournante régionale, surtout dans les quartiers prisés par les voyageurs tels que Yaorawat, Khao San Road et Silom, cette transformation vise à promouvoir le tourisme pour bénéficier l’économie locale.
Ironie et contreverse de la politique publique
Bien que cette démarche paraisse être en phase avec une tendance mondiale de valorisation des espaces piétons, elle est teintée d’ironie à Bangkok. Depuis 2014, une politique restrictive a été mise en œuvre par la BMA sous l’impulsion du pouvoir militaire pour réglementer l’utilisation de l’espace public, sous le slogan “rendre les trottoirs aux piétons”. Cette initiative a bouleversé le quotidien de nombreux commerçants ambulants qui voient leurs revenus s’effriter sous la pression d’une surveillance policière quotidienne et le risque de sanctions.
Disparités dans l’application de la loi
Le strict contrôle policier dans les zones centrales contraste avec une tolérance plus marquée dans les “soi”, les ruelles typiques, où la démarcation entre domaine public et privé s’avère plus floue. Le prix à payer pour une occupation illégale est lourd: saisie de la marchandise et amendes sont monnaie courante pour ces vendeurs qui se trouvent dans l’illégalité aux yeux de la loi.
Une gastronomie de rue à double visage
Alors que l’éviction des marchands de rue se poursuit, les quartiers touristiques bénéficient d’un traitement de faveur, préservant ainsi la réputation de la “street food” de Bangkok, bien ancrée dans l’imaginaire collectif et reconnue internationalement, notamment à travers l’obtention d’une étoile Michelin par la vendeuse de rue Jay Fai. Cependant, cet honneur cache une réalité plus complexe car Jay Fai, avec ses prix bien au-delà de ceux habituellement pratiqués, n’est pas représentative de la majorité des vendeurs de rue plus modestes.
Aménagement stratégique des espaces de vente
Les municipalités participent à la reconfiguration de la vente de rue qui, tout en respectant l’esthétique de la tradition, impose cependant de nouvelles normes rigoureuses aux commerçants (restrictions d’espace, horaires limités, hygiène renforcée), modifiant ainsi profondément cette culture culinaire. Par opposition, la répression quotidienne que subissent les vendeurs informels semble indiquer que le gouvernement ne cherche pas tant à abolir cette pratique qu’à en restructurer le visage.
Les autorités invoquent “la modernisation” pour justifier l’éviction de vendeurs considérés comme désordonnés et antiques par rapport aux centres commerciaux et boutiques. Ces mesures sont révélatrices d’une tension sociale, où les acteurs défavorisés sont peu à peu exclus de l’espace public, au profit des classes aisées ainsi que des touristes. La ville revanchiste s’exerce au détriment de l’accès équitable à la nourriture dans l’espace urbain, redessinant le paysage culinaire de la ville.
Ce changement profond dans les pratiques alimentaires de rue à Bangkok, où le tourisme prend le pas sur le quotidien des résidents, soulève la question de la justice alimentaire. La gastronomie de rue, autrefois accessible à tous, semble désormais se muer en un produit marketé destiné à une clientèle spécifique.
La réflexion présentée ici s’appuie sur les recherches du projet “Street Food” financé par le CNRS et l’INRA.
Bonjour ! Je m'appelle Chris, j'ai 35 ans et je suis un Digital Nomad, expatrié en Thaïlande depuis début 2010. J’essaye de visiter au maximum la Thaïlande tout en développant mes activités sur Internet. J'adore découvrir de nouvelles cultures, rencontrer des gens inspirants et partager mes expériences. Mon site web, je l'espère vous guidera dans votre prochain voyage en Thaïlande.